7 août 2010

Le Maître de ma Rue



Bonjour, Gens,

comment ça va chez vous ?

Je passe en coup de vent, car comme vous vous en doutez, maintenant que ma décision est prise il faut aller vite et faire beaucoup de trucs (comme écrire et poster deux préavis, et aller boire des bières sur la plage).
Je vous passe les détails concernant ma négociation foireuse et usante avec mon actuel employeur au sujet de la réduction de mon préavis contractuel (vivement que je tablerase mon passé moi !), bicoz on est en week-end, donc parlons de choses gaies !

D'abord, au cas où vous auriez loupé cette info d'importance capitale : Francis Lalanne se lance dans le zouk. Je sais que la nouvelle va vous ravir, je ne pouvais pas ne pas la diffuser.
C'est chose faite.

A part ça, message perso à celui qui m'a envoyé un texto concernant mon départ à Paris-la-martyrisée : merci et bonne continuation en terres bordelaises à toi, parigot repenti !

Sinon, fallait que je vous parle de ce personnage dont j'ai fait la connaissance.
Un vieux qui habite un peu plus loin dans ma rue et joue un rôle à la fois de concierge, d'alpagueur public et de râleur.

Je l'ai croisé l'autre jour, j'ai cru que c'était un vieux SDF, rapport à sa ressemblance avec un SDF qui squatte en permanence à quelques pâtés de chez moi ; il a un look d'as de pique et une diction d'arsouille. A y regarder de plus près, et après quelques jours d'observation, il semble qu'il ait un domicile fixe, c'est presque un voisin.

L'autre jour, donc, alors que je rentrais chez moi, il m'a interpellée sur le fait que quand même ! , on pourrait rentrer nos bacs, ça fait pas propre dans la rue, et tout ça.
Notre bac gris était effectivement sur le trottoir, et j'ai vécu quelques secondes de doute et de honte (rappelle-toi la merde intergalactiquement anarchique qui règne dans mon immeuble dans la gestion des ordures depuis l'installation des bacs de tri, j'en ai parlé dans un billet de mon précédent blog). Puis j'ai regardé, vérifié, et laissé le bac gris car il se trouve que c'était justement le jour de ramassage des bacs gris. L'honneur était sauf.

Ce matin, levée de bonne heure et de belle humeur (car rappelle-toi, une journée marathon m'attend), je commence par décider de vider le verre que j'entasse depuis des mois dans un coin de ma microscupule cuisinette.
J'ai un système au poil pour ça : je l'entasse dans un caddy de petite vieille pour faire le marché, rapport que comme ça, pour aller le vider, y'a qu'à faire rouler le bouzin, c'est drôlement pratique tu vois ! (sauf que mon caddy de petite vieille n'exercera plus jamais sa fonction de base pour le marché, rapport qu'il pue la vinasse et tout ça...).
Là, j'avoue, il était un peu trop rempli, peut-être. Je te raconte pas l'effort pour descendre les trois étages de mon escalier escarpé et fourbe... au bout de ce qui m'a semblé être 45 bonnes minutes, je sortais enfin de mon immeuble.
For your record, j'habite une ruelle pavée dans un quartier de rues pavées, qui confèrent au-dit quartier un intérêt visuel indéniable, mais sont un calvaire pour la fille en talons que je suis (bon, les talons, pas pour aller sortir le verre, on est bien d'accord hein ! ), et aussi, qui compliquent drastiquement toute expédition incluant un caddy bringuebalant débordant de verre.
Donc, une fois dans la rue, pas loupé, au bout de 30 secondes : BAM, CRAAC, SCHLING, BADABOUM... une bouteille s'échappe du caddy et s'explose sonorement au sol.

Le vidage du verre en environnement citadin, sache-le si tu ne le sais déjà, ami lecteur, implique plusieurs grands moments de solitude ; pour ma part, j'en dénombre trois :

- 1 - trajet sur les pavés avec ton caddy s'accompagnant d'un bruit de casseroles, que tous les passant savent pertinemment n'être pas des casseroles, mais des contenants en verre vides (i.e tu passes pour une alcoolo, quand bien même ton caddy n'est rempli que de bouteilles de jus d'orange ou de bocaux vides d'haricots verts et de sauce tomates, ce qui est bien évidemment mon cas, tu sais... hem hem)

- 2 - chute d'une bouteille dont le son non équivoque finit d'attirer définitivement sur toi l'attention des gens alentour ( i.e tu passes pour une alcoolo, quand bien même ton caddy n'est rempli que de bouteilles de jus d'orange ou de bocaux vides d'haricots verts et de sauce tomates, ce qui est bien évidemment mon cas, tu sais... hem hem)

-3 - devant le container vide-verre, ultime moment de solitude, climax de l'action : passer une à une tes bouteilles sous l'oeil amusé, agacé ou réprobateur des passants (si tu vides ton verre aussi souvent que moi, tu en as au moins une bonne cinquantaine), et l'oreille excédée des riverains.
Là, c'est long et pénible ( i.e : tu as beau essayer d'avoir l'air nature, relaxe, décontracte, genre ' j'assume ma vie nocturne hautement sociale, et en plus je fais un geste écocitoyenresponsable, alors que toi, petite vieille qui me regardes depuis 5 minutes avec un oeil de buse, qui comptes le nombre de bouteilles de Leffe vides qui tombent avec un son cristalin, et puis celles de gros rouge qui tache, oui, toi, Tatie Danielle, tu la sauves, toi, la planète, en faisant ton tri ??? hein ? Hein ?!!? Tss tss... ' - bref, t'as beau essayer d'avoir l'air naturel, soyons honnêtes : c'est difficile).

J'en reviens à mon récit : bim, bam boum, ma bouteille vide (de jus d'orange, le miracle statistiquement improbable ! ) se ramasse lamentablement sur les pavés.
Ce doux son a du attirer l'attention de mon voisin as de pique, parce qu'il a immédiatement jailli de son immeuble (à croire qu'il passe son temps en faction derrière la porte d'entrée), pour me crier " alors petite, tu fais tomber ton verre ??? Mais où tu vas comme ça ? Il est pas bien ficelé, ton chariot !!!! ".
Puis s'est approché, tel le guépard flairant sa proie.
Cette soudaine proximité m'a permis de détailler son habillement des plus interpellant : vieux polo des années 80, mix entre une chemisette avec des imprimés improbables, et un t-shirt de cycliste en lycra. Fascinant...
Le tout bien rentré dans un jean sans âge remonté jusque sous la poitrine, avec une grosse ceinture. Des bagues aux doigts et ce qui m'a semblé être quelques bracelets de force, en mode " motard de Harley easy rider repenti". Intéressant...
Il a ensuite embrayé sur le fait qu'il fallait pas que je me coupe, quand-même (je suis bien élevée et respectueuse, je ramassais mes débris).
Et qu'il venait de balayer toute la rue (preuves à l'appui : des petits tas de poussière, détritus et autres réjouissances citadines étaient méticuleusement amassés tous les 5 mètres), parce qu'il en peut plus de cette rue qui pue (et je ne le contredirai sûrement pas à ce sujet : ma rue et mon quartier, à l'instar de pas mal de coins du Vieux Bordeaux, refoulent l'étron canin, la pisse humaine, et les relents d'alcool, et sont jonchés de saloperies en tous genres).
Puis il m'a aidée à remettre en ordre mon bouzin, en sortant pas mal de bouteilles vides pour les remettre en ordre de manière soigneuse, permettant un gain de place non négligeable dans le caddy.
Ce faisant, il a laissé échapper un " eh beh, tu bois beaucoup, ma jolie ! " (j'ai bafouillé, rouge de honte, une vague explication sur le fait que oh non! , en réalité, pas tant que ça, hein, c'est juste que je le vide pas souvent quoi...).
Il a aussi commenté la qualité de mes breuvages ( " celle-là, elle est très très bien ! " en désignant une grande bouteille de Leffe Blonde).
Je me suis dit que l'alcool, c'est comme les origines berthonnes, finalement, on trouve partout des gens qui font partie de la secte, et ça fait un sacré sujet de conversation !
Ensuite il a halluciné quand je lui ai dit où j'allais vider mon verre (depuis des années), càd des tous petits containers, alors que plus près, il y en a deux énormes. Cette révélation va m'être très utile, tu t'en doutes, vu que je serai plus là dans un peu moins de 2 mois !!!! - C'est tout moi, ça, fallait que j'attende 5 ans et mon départ imminent de cette ville pour découvrir que je me fais iéch à me galérer quand je vide mon verre, alors que y'a beaucoup mieux plus près ! - .
Je suis repartie cahin-caha avec ma charriotte. Pis j'suis allée faire des courses (acheter des bières pour ce soir- note que le caddy à vider le verre de la Nilaa, c'est un peu le Tonneau des Danaïdes, quoi ! ).

A mon retour dans ma rue pavée, le son produit par mon caddy était pas vraiment différent de celui produit quelques minutes plus tôt, rapport à l'achat très récent de bières sus-mentionné (un pack de bières, même pleines, ça s'entrechoque de la même manière sonore que des bouteilles vides, à quelques nuances près).
Donc As de Pique a de nouveau bondi hors de sa tanière.
Pour m'entreprendre à nouveau sur les bacs qu'on rentre pas assez (en l'occurrence, aujourd'hui, aucun ne traînait devant chez nous, on s'améliore).
Exigeant une explication.
Je lui ai fait part du fait que la plupart des habitants de mon immeuble sont des étudiants, donc qu'en ce moment, l'immeuble est plutôt du genre désert parce que déserté, de ma récente propre absence due à mes congés, et que j'en ai marre de toujours m'occuper toute seule de ces fichus bacs, que j'ai appelé la CUB il y a trois mois pour avoir un bac perso dans mon appart parce que je peux pas non plus éduquer mes voisins, et que j'en ai marre que les éboueurs refusent de vider nos bacs verts parce que les autres de mon immeuble, ils foutent des trucs organiques dedans, ces teubés (la dernière fois encore : de la litière souillée), que la CUB m'a dit qu'ils allaient faire une réunion pédagogique pour tout bien expliquer aux gens de l'immeuble comment on fait le tri (je crois qu'ils feraient mieux de leur apprendre à lire, ça irait plus vite), mais depuis, pas de nouvelles de la CUB, et que de toute façon : JE M'EN BATS GRAVE LE COQUILLARD, rapport qu'incessamment sous peu, JE ME CASSE !!!!
Après, As de Pique a commencé à alpaguer les voisins alentour en me disant : " celui-là, là " (oui, celui là, qui était en train de taper le petit-déj sur son balcon juste au dessus de nos têtes et entendait parfaitement notre conversation), " oui, celui-là, oui, toi, tu m'entends ??? Il m'entend, j'en ai rien à foutre, j'en ai marre, il se fout de tout, j'arrête pas de lui dire de rentrer ses bacs, c'est un je-m'en-foutiste, hein, tu t'en fous de ce que je te dis, hein ??? Tu pourras rentrer tes bacs steuplé ??? " .
Ca me faisait moitié marrer (je te rappelle que de manière générale dans la vie, j'aime les gens), moitié flipper (je te rappelle que du coup, comme j'aime les gens, dans la vie, comme je suis très affable et que j'ai la papote facile et naïve, je tombe souvent sur des désaxés) .

Et puis il a enchaîné : "eux, là, au numéro 13, ils m'énervent, c'est rien que des homosexuels ".

Là, c'était plus drôle du tout...
J'ai fait " oui, bon, bah moi je vais y aller, hein ! Bonne journée Monsieur ! ".

Et je suis rentrée chez moi....






6 commentaires:

  1. Ben qu'est-ce que t'as contre l'homophobie? tu serait pas un peu intolérante, des fois? :-)
    Oui, sur le reste du billet aussi, y'avait à dire, mais j'ai une mémoire de poisson rouge, alors je sais plus ce que je voulais réagir en début de lecture.
    Ah si! Je confirme et approuve ta théorie sur le vidage de verre. Je rajouterais même que pour boire des canons y'a toujours du monde, mais que quand il s'agit de vider le verre, ben t'es toujours très seul(e)...et accrédite la thèse de ton alcoolisme supposé alors que non, pas du tout (enfin, presque pas du tout)(enfin, tu vois, quoi)

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  2. Hey Jack, c'est trop chouette de te lire à nouveau !!!!!!!!
    Rentré de congés ?

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  3. bah ouaip, malheureusement...
    Beh, me lire oui, mais juste chez les autres pour l'instant (j'arrive pas à trouver assez à dire chez moi...)

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  4. Bin qué passa ?
    Angoisse de la page blanche ;-)
    Ou juste que les vacances t'ont tellement déconnecté que c'est difficile de se remettre dans la réalité, aussi bloguesque soit-elle...?
    J'ai connu ça il y a peu de temps.
    Allez, trouve des idées, tes billets m'ont manqué !!! (je suis une sale gosse, je déteste quand les gens me disent : " putain, t'écris plus, c'est quoi ce bordel ? " , j'ai l'impression qu'on me colle un gun sur la tempe à chaque fois, au détriment de ma spontanéité créatrice... mais je le fais aux autres ! ;-) -

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  5. Hey, youpi : je suis pas la seule à papoter avec des chiens à chapeau et des vieux rigolos (jusqu'à un certain point) dans mon immeuble ou à côté.

    Je reviendraaaa te lire... rapport que j'aime ton staïle d'écrivage.

    :-)

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  6. Merci m'dame l'affirmée !
    Tout pareil ;-)
    PS : des nouvelles du Lièvre Motard ?

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