14 avril 2010

La Lymphe et moi

Ca fait longtemps que je vous ai parlé du corps médical et de mon corps malade.

Tout à l'heure, j'étais chez mon médecin.
Mon médecin est une nana, ultra dynamique (c'est un euphémisme), toujours souriante, et même si, parfois, elle a tâtonné avec mes maladies chelou, je la kiffe.

Là, j'y allais notamment parce que je suis un peu handicapée depuis la dernière opération, qui date quand même d'il y a deux mois, donc si, au début, je voulais bien croire que ça finirait par passer, à la fin, là, plus du tout.

Quand tu vas chez mon médecin, tu sais que t'as intérêt à avoir un pavé sous le bras (pas le droit, en ce qui me concerne, car c'est bien là que le bat blesse, et la raison de la consultation de ce soir...).
Un pt'it " Guerre et Paix " de derrière les sarments - ou pourquoi pas la Bible, allons-y gaiment ! -.

Vous l'aurez compris, quand tu prends rdv chez mon médecin, faut avoir minimum une bonne heure à tuer devant toi... et les rares fois où tu l'appelles pour une urgence, et qu'elle te dit " euh... passez vers 20h", tu sais que tu vas faire nocturne dans sa salle d'attente pas trop réglementaire.

Je ne sais pas quand elle dort, cette nana.
Peut-être qu'elle prend des substances pour tenir le coup (elle est bien placée pour s'en procurer, j'imagine), parce que, franchement, elle est toujours pimpante.
Non, en fait, je crois pas, pour les substances. Je crois qu'elle est juste saine comme tu l'attends d'un médecin.

Sa salle d'attente, c'est marrant (ou pas...), c'est pas vraiment une salle d'attente.
N'espère pas y voir de douillets fauteuils et un apaisant aquarium, ou même des Voici qui traînent sur la table basse.
Y'a pas de table basse, de toute façon.
Alors des Voici, faut pas rêver !
C'est une sorte de mini-couloir biscornu avec quatre pauvres chaises.
Ce qui n'enlève absolument rien à la compétence de mon médecin.

Aujourd'hui, pour la première fois, j'ai eu l'occasion de découvrir les ouatèreclozètes de chez mon médecin, rapport que j'avais bu des litres de thé et que l'attente était définitivement trop longue.
En 5 ans de fréquentation de mon médecin, j'avais jamais eu l'opportunité de découvrir son pipi-room.
A tel point que je m'étais toujours demandé s'il y en avait, des gogues, et le cas échéant, où ils pouvaient bien se planquer, dans cette surface minuscule.
Il y avait aussi cette porte toujours fermée qui m'intriguait beaucoup.
J'imaginais une vaste pièce pleine d'archives ultra-confidentielles, qui allaient bien avec l'alarme qu'il y a dans le cabinet + le visiophone (parce que mon médecin, non contente d'exercer dans un quartier craignos de Bordeaux, est aussi une sorte d'expert pour la justice, ou de médecin légiste ou je sais pas trop quoi, et des fois, elle s'est faite agresser apparemment, d'après ce quelle m'a raconté).

Bon, ce soir, j'ai eu la réponse à deux questions pour le prix d'une : quand je lui ai demandé le chemin des Toilettes, elle m'a remis une clé.
Je me suis prise pour Passe-Partout (en moins horizontalement sclérosée), je me sentais hyper fière de cette responsabilité.
La clé ouvrait la fameuse porte.
Où se trouvent donc les Toilettes.
Qui n'ont franchement rien de confidentiel, en vrai.

Après, elle m'a expliqué qu'elle est obligée de verrouiller cette porte, car on lui pique tout, le PQ, et même la balayette à chiottes, et même, une fois, une petite gens-du-voyage a peint sur les murs de ses WC avec ses excréments.
J'ai essayé de la faire marrer en lui disant que c'était finalement une forme d'art contemporain assez freudienne, mais elle m'a dit " Nilaa, je vous aime beaucoup, mais là, je vous assure, c'était pas drôle ! " (je veux bien la croire).
Je pense que ça doit être fatiguant de vivre dans la crainte permanente qu'on te vole ta brosse à chiottes, quand même ! Ou qu'on te retapisse tes murs avec des étrons.
Ce qui n'enlève rien à la compétence de mon médecin.

Ce soir, j'ai eu l'occasion de communiquer visuellement avec un bébé d'environ 1 an, assis sur les genoux de sa maman ; quand je l'ai vu, l'expression " morveux " qui désigne les mômes dans le langage courant a pris tout son sens.
Le pauvre morvait, toussait, et respirait de manière drôlement encombrée des bronches.

Longtemps, j'ai cru que les mioches ne m'aimaient pas. Ils se mettaient souvent à pleurer quand je les prenais dans mes bras.
Un peu comme les chiens qui sentent que tu as peur d'eux, les enfants doivent sentir ton malaise quand on te les colle à proximité sans que t'aies rien demandé à personne.

Et puis j'ai découvert la salle d'attente de mon médecin, où traînent souvent une ou deux têtes blondes, et là, systématiquement, je m'en fais des potes.
Celui-là me regardait avec des grands sourires, il était chou malgré sa bave, sa morve et ses yeux fiévreux. Pour l'occuper, sa mère lui a filé une cuillère. Ca l'a éclaté.
Puis son téléphone portable. Je ne peux toujours pas m'expliquer sa relation et son comportement avec le portable. Inlassablement, il le tapotait, et le collait dans le creux de son cou. Pas à son oreille, non, mais entre sa clavicule et son cou.
Zarbe...

Ensuite, j'ai entendu quelqu'un qui montait les escaliers.
Quand j'entends quelqu'un monter les escaliers, chez mon médecin, je sais qu'inratablement, ça va être une gonzesse.
Le cabinet est au 4ème, y'a que les gonzesses qui font attention à leur ligne qui montent quatre étages à pieds quand y'a un ascenseur (sauf moi, même si c'est pas faute d'avoir pris du poids de la bête, ces derniers temps - du poil aussi, peut-être, à la réflexion, eu égard à mon célibat).
Pas loupé, c'était une gonzesse très jolie, très apprêtée, avec la fesse et le cuissot fermes, j'en suis sûre (histoire quand même qu'elle s'inflige pas ça pour rien).

Après sont arrivés une maman avec sa petite d'environ 3 mois (depuis que mes copines se sont mises à expulser des brioches de leurs fours à tours de bras, je sais dater un bébé, moi ! ), avec son fils d'environ 5 ans. Le fils était excellent, il s'amusait avec des figurines de Shrek (qu'il prononçait " Chèque" ) et Pikachu (qu'il prononçait correctement).
Il est venu me tchatcher pendant quelques minutes.
Puis sa soeur s'est mise à hurler de manière incontrôlable, la mère savait plus quoi faire pour calmer sa gamine.

La dame très élégante a esquissé un geste d'agacement sans aucune empathie. Ca la saoûlait grave, tu comprends, surtout qu'elle était plongée dans un pavé.
Le petit frère m'a regardée d'un air trop chou, genre " désolé, hein, c'est pas moi, c'est ma soeur, tu sais ce que c'est, les chiards...".

Du coup, quand mon médecin est sortie, et alors que c'était ENFIN mon tour, je me suis tâtée deux secondes, et devant le choix cornélien qui s'offrait à moi, j'ai laissé gracieusement ma place à la mère et ses deux mioches.
C'était pour me rattraper de tout le mal que j'ai pu penser des Gens hier en courant.
Je vous raconte ça pour que vous réalisiez un peu l'étendue de ma grandeur d'âme charitable.

Quand mon tour est revenu, je m'attendais vraiment à ce que mon médecin me dise que la prochaine étape, c'était l'amputation.
Ca me traumatisait pas plus que ça, en fait, parce que c'est tellement la surloose pour moi ces temps-ci, qu'un peu plus, un peu moins (un bras, quand même), ça aurait pas changé drastiquement le cours de ma vie (surtout depuis que je sais qu'on peut être manchot et cuisiner comme un TopChef).

Quand je lui ai raconté la cause de ma venue, elle m'a immédiatement demandé de me foutre torse-poil, et moi, ça m'a fait tout drôle, parce qu'en 5 ans, je lui avais jamais montré mes nibs.
En plus le store du cabinet était pas baissé, et y'a comme qui dirait un sacré vis-à-vis sur l'immeuble d'en face. Donc je me suis exécutée, mais au bout de 10 secondes, je lui ai quand même fait remarquer que les voisins pouvaient nous voir (surtout moi, en fait). Elle m'a répondu que ses baies vitrées étaient teintées de noir.
Ca m'a rassérénée(), du coup j'en aurais presque enquillé une petite topless-dance comme Sabrina-boys-boys-boys-I'm-looking-for-a-good-time.

Et très vite, elle a soupiré de soulagement, en me disant que tout ça, c'était du à la énième ponction qu'on m'avait faite, et que mes canaux lymphatiques sont écrasés et à plat, mais que comme la nature déteste le vide, ils vont bientôt se re-remplir, faut juste leur laisser le temps.
Et me masser. Jusqu'au ventre ; ou plutôt, à partir du ventre (car apparemment les canaux descendent très bas - sacrément, tout de même, quand j'y pense ! ).

Encore un coup de la Lymphe, comment n'y avais-je pas pensé plus tôt ????

Il y a quelques années, avant de me diagnostiquer une maladie qui a un nom proche de notre Président (et en plus, c'était pendant les présidentielles, elle est pas trop fun et telllllllllllllllement poilante, la Vie ? ), on m'a dit que j'avais soit cette maladie au nom chelou, soit un Lymphome (un cancer de merde, quoi).

Quand j'ai eu les premières complications post-op en octobre, et qu'il a fallu ponctionner, c'est parce que j'avais une accumulation de Lymphe sous l'aisselle.

Après la ponction, je fuyais de partout (un peu comme ce type dans la pub Axe), et c'était encore un coup de la Lymphe (mais au moins, elle s'écoulait).

Là c'est encore un mot qui commence par "lymph" mais je sais plus lequel.

Mon médecin me sort toujours un mot qui commence par " Lymph", elle doit être trop forte en mots-compte-triple, faudrait que je la présente à ma grand-mère...

Faut dire que moi (comme vous, j'imagine), avant toutes ces emmerdes, à part " drainage lymphatique ", j'étais pas très riche en vocabulaire de la Lymphe.

Maintenant, je suis plus trop collable en la matière.

Mon médecin m'a quand même avoué qu'au début, quand je lui ai dit mes symptômes, elle a vraiment eu peur, elle a cru qu'ils avaient touché un nerf, ou un muscle en m'opérant. Donc au final, elle était soulagée (alors que pas moi, tu penses !!!).


Je terminerai cette note sur le monde de la santé en lançant un grrrrrrrrrrrrros big up à mon amie X qui me lit probablement depuis son lit, là-bas, dans le grand bâtiment où se posent des hélicos, entre un Gala et la bio d'AKH.
Courage, plus que quelques jours et c'est la quille, ma belle....





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